samedi 3 janvier 2015

Hommage à la compétence


Je ne sais pas pourquoi le mot retraite me turlupine, chaque fois, que je l’entends. Dès que je me mets à cogiter là-dessus, je m’aperçois tout de go que mon esprit crie à l’hérésie du fonctionnariat. Le retraité ne sait plus, le pauvre, à quels saints se vouer. Remercié à un âge avancé, avec une pension dégrossie au maximum, avec l’abandon d’un poste où le prestige de l’occuper en est la satisfaction intrinsèque, il se retrouve du jour au lendemain dans une nébuleuse où point de ligne d’horizon visible, point de sentier clair à suivre et point de passerelle pour un futur proche à prendre. Au jour de son départ, il attend une main tendue et clémente de ses collègues, une reconnaissance pour les efforts consentis pendant de longues années de labeur.

Conscient de cet état de fait, puisque j’y suis passé, j’ai juré de toujours être là pour rendre hommage à mes collègues et leur insuffler un brin de courage et leur prêter main forte, ne serait- ce qu’en usant de gallicismes  réconfortants et empathiques à leur égards. Pas une seule fois, je n’ai failli à cette règle, jusqu’au jour où ce fut le tour d’un collègue très cher à mes yeux, auquel, je n’ai pu assister lors de son départ, pour n’avoir pas été avisé. 
  
Mais pour ne pas m’avouer vaincu et rattraper le coup, je voudrai rendre hommage à cette personne, dont le parcours depuis son arrivée à son poste en 1981, à l’Office National de l’Eau Potable (l’actuel ONEE) est tout à fait exceptionnel. Il s’agit de M. El Mghari Tabib Mohamed, Docteur en chimie de l’eau et de l’environnement. Cet homme, depuis sa prise de service au laboratoire central de l’ONEP, s’est très vite démarqué au sein de l’équipe, responsable de la paillasse de physico-chimie, dont il prit les rennes quelques temps après.
Ma première entrevue avec lui, je m’en rappelle comme hier, avait concerné le contrôle du résultat d’un paramètre dont la valeur sur terrain était trop éloignée de celle obtenue au laboratoire. Ce fut le jour où j’ai vraiment soupesé la personne, car, en scientifique avéré, il assista à une analyse contradictoire, au niveau de la salle de chimie et découvrit alors que la valeur erronée était plutôt celle obtenue au laboratoire et non celle du terrain. C’est dans des cas pareils que l’on reconnait les professionnels, les vrais, car M. El Mghari, géra ce quiproquo avec un calme et une maitrise inouïs. Depuis je lui présageais un avenir florissant à l’ONEP et je me félicitais, pour l’office, d’avoir une nouvelle recrue de cette classe.
A la télévision à l’émission
MOUATIN AL YOUM
Au fil des années, beaucoup d’eau à couler sous les ponts pour rejoindre les retenues de barrages et être harnachée par les soins de M. El Mghari qui, maintenant en sus de la chimie, la direction lui confia également la responsabilité du traitement des eaux, où comme à son habitude, il se distingua et y apporta moult améliorations, tant en qualité qu’en quantité d’interventions. Désormais il était devenu, incontournable, à juste titre, dans toutes les décisions scientifiques ou organisationnelles que le laboratoire devait prendre. Sa grande facilité de communication, ses solides connaissances du métier, son respect pour ses collaborateurs, sa grande faculté d’écoute, sa méthodologie scientifique de chercheur confirmé y étaient pour beaucoup.
On sentait même chez lui que le carcan administratif des postes de responsabilité qu’il a brigués, le gênait quelques peu, parce qu’il savait pertinemment que pour être performant dans ce domaine, il était indubitable de  rester coller au technique. Ceci lui permettait de demeurer très proche et à l’écoute et de ses collaborateurs qui étaient positionnés dans le chemin critique de la production du résultat des analyses. Il lui arrivait même quand le besoin s’en faisait sentir de retrousser ses manches et participer à quelques analyses. La dernière à laquelle, j’ai moi-même assisté, est celle d’un essai de toxicité sur poisson, qu’il a réalisé, haut la main avec une dextérité fulgurante et avec en prime une remarque pertinente sur le mode opératoire de la méthode utilisée.
Ceci est la charnière qui m’amène à parler d’une autre facette de de M. El Mghari. Eh Oui, le souci inné qu’il avait de vouloir toujours s’améliorer, doublé d’un esprit critique et positif, ont fait de lui la personne idoine pour prendre en charge le projet de mise en place de l’assurance qualité qu’il mena tambour battant, avec le précieux concours d’une certaine ASSAGA Fatima, jusqu’à l’obtention d’une double reconnaissance en terme d’accréditation. Plus tard, il s’attela à un autre projet, sur la même lignée, celui de la qualité totale et devint le représentant de l’office devant les instances nationales et internationales sur ce volet.

Globalement son parcours est, on ne peut plus riche, en interventions de tout genre, depuis ses nombreuses communications techniques se rapportant à la qualité de l’eau jusqu’aux innombrables réunions de suivi des projets d’ordre organisationnel et/ou de qualité, à tel point, qu’il serait prétentieux de ma part de vouloir les citer toutes d’une manière exhaustive.
Délégation  en visite du laboratoire
 en présence du DG  ONEP
Ceci lui valut d’être, enfin, nommé à la tête de la direction laboratoire vers la fin des années 2000 (juin 2008). Cette consécration, tout à fait méritoire, lui permit d’avoir les coudées franches pour maintenir le laboratoire à un niveau de maitrise de la qualité sur une courbe ascendante, qui a fait resplendir la renommée de l’Office à l’échelle régionale et internationale.
En hommage, à cette personne, qui fût et restera une référence sans conteste, pour toutes les personnes qui l’ont connu, je dirais, simplement MERCI. Saches que tu as rempli ton contrat avec brio, tes enfants, tes proches, tes collègues peuvent s’enorgueillir d’avoir été tes contemporains.
Pour ma part, je déclare qu’un commandant de bord chevronné, tel que lui, timonier quand il le faut, homme de barre quand il le faut, et homme de cale quand il le faut, vient de mettre pied à terre, laissant le joli paquebot qu’il a longtemps maintenu à flot, à quai et bien amarré. Autant, je suis content pour lui, d’avoir mené son embarcation à bon port, autant je souhaite que son successeur soit bon navigateur,  une fois le bateau à nouveau en haute mer, car il serait dommage qu’un tangage maladroit puisse envoyer, la précieuse cargaison si durement obtenue, par le fond.
Au revoir Si El Mghari, je te souhaite de rester en bonne santé, dynamique et actif comme tu l’as toujours été.


Un collègue et un ami inconditionnel : Salah ABDELMOUMENE (Rabat)

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